Un rizoma

Un rizoma es un tallo subterráneo con varias yemas que crece de forma horizontal emitiendo raíces y brotes herbáceos de sus nudos. Los rizomas crecen indefinidamente, en el curso de los años mueren las partes más viejas pero cada año producen nuevos brotes, pudiendo de ese modo cubrir grandes áreas de terreno.

"Tout ce que nous éprouvons aujourd’hui sur le mode de la limite, ou de l’étrangeté, ou de l’insupportable, aura rejoint la sérénité du positif"


Foucault visionnaire


En relisant, ce matin à l’aube, l’article La folie, absence d'œuvre publié en 1964 par Michel Foucault dans le numéro 196 de La Table Ronde dont le thème était La situation de la psychiatrie, je me retrouve devant des mots écrits –il y a près de cinquante ans- dont la lucidité aigüe me frappe.
Ils font acte du caractère visionnaire de Foucault sur ce point précis.  Foucault émet une hypothèse que toutes les observations contemporaines confirment dans sa justesse. Citons aujourd’hui le texte de Foucault. Laissons –pour l’instant- en suspens une réflexion nécessaire –selon nous- basée sur le lien entre ce qu’avance Foucault en 1964 et les observations possibles aujourd’hui. Par exemple, il faudrait s’attarder sur la réflexion que développe Christopher Lane, professeur à l’université de Northwestern, dans un édifiant essai intitulé « Shyness : How normal behaviour became a sickness » ( Comment la psychiatrie et la l’industrie pharmaceutique ont médicalisé nos emotions, Flammarion). Il s’agit d’un débat important, d’autant plus aujourd’hui où à chaque mal-être correspond un dit symptôme dans le discours psychiatrique et pharmacologique, et où, à chaque dit symptôme, correspond un médicament.


Voilà le texte de Foucault, en 1964. 


"Peut-être, un jour, on ne saura plus bien ce qu'a pu être la folie. Sa figure se sera refermée sur elle-même, ne permettant plus de déchiffrer les traces qu'elle aura laissées. Ces traces elles-mêmes seront-elles autre chose, pour un regard ignorant, que de simples marques noires? Tout au plus feront-elles partie de configurations que nous autres maintenant ne saurions pas dessiner, mais qui seront dans l’avenir les grilles indispensables par où nous rendre lisibles, nous et notre culture. Artaud appartiendra au sol de notre langage, et non à sa rupture ; les névroses, aux formes constitutives (et pas aux déviations) de notre société. Tout ce que nous éprouvons aujourd’hui sur le mode de la limite, ou de l’étrangeté, ou de l’insupportable, aura rejoint la sérénité du positif. Et ce qui pour nous désigne actuellement cet Extérieur risque bien un jour de nous désigner, nous.
Restera seulement l’énigme de cette Extériorité. Quelle était donc, se demandera-t-on, cette étrange délimitation qui a joué depuis le fond du Moyen Âge jusqu’au XXème siècle et au-delà peut-être ? Pourquoi la culture occidentale a-t-elle rejeté du côté des confins cela même où elle aurait pu aussi se reconnaître- où de fait elle s’est elle-même reconnue de manière oblique ? Pourquoi a-t-elle formulé clairement depuis le XIXème siècle, mais aussi dès l’âge classique, que la folie, c’était la vérité dénudée de l’homme, et l’avoir pourtant placée dans un espace neutralisé et pâle où elle était comme annulée ? Pourquoi avoir recueilli les paroles de Nerval ou d’Artaud, pourquoi s’être retrouvée en elles, et pas en eux ?
Aussi se flétrira la vive image de la raison en feu. Le jeu bien familier de nous mirer à l’autre bout de nous-mêmes dans la folie, et de nous mettre à l’écoute de voix qui, venues de très loin, nous disent au plus près ce que nous sommes, ce jeu, avec ses règles, ses tactiques, ses inventions, ses ruses, ses illégalités tolérées, ne sera plus et pour toujours qu’un rituel complexe dont les significations auront été réduites en cendres. Quelque chose comme les grandes cérémonies d’échange et de rivalité dans les sociétés archaïques. Quelque chose comme l’attention ambiguë que la raison grecque portait à ses oracles. Ou comme l’institution jumelle, depuis le XIVème siècle chrétien, des pratiques et des procès de sorcellerie. Entre les mains des cultures historiennes, il ne restera plus que les mesures codifiées de l’internement, les techniques de la médecine, et, de l’autre côté, l’inclusion soudaine, irruptive, dans notre langage de la parole des exclus.
Le support technique de cette mutation, quel sera-t-il ? La possibilité pour la médecine de maîtriser la maladie mentale comme telle autre affection organique ? Le contrôle pharmacologique précis de tous les symptômes psychiques ? Ou une définition assez rigoureuse des déviations de comportement pour que la société ait le loisir de prévoir pour chacune d’elles le mode de neutralisation qui lui convient ? – Ou d’autres modifications encore dont aucune peut-être ne supprimera réellement la maladie mentale, mais qui auront toutes pour sens s’effacer de notre culture le visage de la folie ?
Je sais bien qu’en faisant cette dernière hypothèse je conteste ce qui est admis d’ordinaire : que les progrès de la médecine pourront bien faire disparaître la maladie mentale, comme la lèpre et la tuberculose ; mais qu’une chose demeurera, qui est le rapport de l’homme à ses fantasmes, à son impossible, à sa douleur sans corps, à sa carcasse de nuit ; que le pathologique une fois mis hors circuit, la sombre appartenance de l’homme à la folie sera la mémoire sans âge d’un mal effacé dans sa forme de maladie, mais s’obstinant comme malheur. A dire vrai, cette idée suppose inaltérable ce qui, sans doute, est le plus précaire, beaucoup plus précaire que les constances du pathologique : le rapport d’une culture à cela même qu’elle exclut, et plus précisément le rapport de la nôtre à cette vérité de soi-même, lointaine et inverse, qu’elle découvre et recouvre dans la folie."

MBF
6 avril 2010, à O.

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